Actus Madagascar 14 mars 2012

Magazine – Élevage : Le zébu, un patrimoine national en péril

La flambée du prix de la viande de zébu sur le marché révèle l’existence d’un problème qui mine la filière. Laissée presque à l’abandon depuis des années par l’État,...

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La flambée du prix de la viande de zébu sur le marché révèle l’existence d’un problème qui mine la filière. Laissée presque à l’abandon depuis des années par l’État, la production de cette denrée alimentaire n’arrive plus à satisfaire la demande sur le marché.

La viande de zébu détrône la viande de porc et est en passe de devenir une denrée de luxe, associée aux repas de fête par les Malgaches. C’est véritablement le monde à l’envers car une telle situation était inimaginable, il y a encore deux ans. Pour la première fois, cette année, le prix du kilo de la viande de zébu atteint le montant record de 10 000 ariary, alors que le porc s’affiche au maximum à 8 000 ariary. Les professionnels au niveau des abattoirs et des boucheries de la capitale sont unanimes, quant à l’origine de ce renversement de tendance. L’offre a diminué jusqu’à 50%, voire plus. Ce qui a créé une tension sur le marché. Un responsable de l’un des principaux abattoirs qui approvisionnent la capitale et ses périphériques révèle que le nombre de zébus tués par jour est passé d’une cinquantaine à une vingtaine. 
«Auparavant, notre fournisseur livrait au moins une centaine de têtes par semaine. En ce moment, c’est à peine si nous recevons une cinquantaine qui sont achetés à des prix très élevés », affirme notre interlocuteur, préférant garder l’anonymat pour des raisons de sécurité. 
Cette baisse de la production n’est pas sans impact sur les activités des professionnels de ce secteur. Onisoa Ralantomalala, un boucher d’Andravoahangy, a été frappé de plein fouet par la « pénurie ». En effet, il n’ a plus droit qu’à un zébu par jour alors qu’auparavant, il en recevait au moins cinq. «Je commence à vendre à six heures du matin et j’épuise ma marchandise en une heure », témoigne-t-il. Son revenu a véritablement chuté et risque de ne plus suffire pour payer les quatre personnes qu’il emploie. «Je ne sais pas jusqu’à quand cette situation va durer mais c’est grave », déplore-t-il. 
En tout cas, ces constats mettent en évidence que le problème se trouve à la source, en amont de la chaîne, c’est-à-dire, auprès des éleveurs et des marchés à zébus. Une situation que certains professionnels voulaient résoudre depuis longtemps. Le nombre de zébus qui arrivent sur les grands marchés comme Ambatonampoaka ou Tsiroanomandidy diminue en quantité et surtout en qualité. Les grands mâles ou vositra se raréfient tandis que les jeunes » arrivent en masse sur les marchés. De plus, les zébus qui arrivent sur le marché ont des tailles de plus ne plus petites. C’est sans doute l’effet de la consanguinité entre les mâles et les femelles dans la chaîne de reproduction et qui dure depuis plusieurs générations.
Ajouté à cela, la commercialisation à outrance des femelles en âge de procréer. Or, cette pratique est interdite par la loi, mais tout le monde semble fermer les yeux sur la situation. Il est donc normal que les fœtus de zébus frits dont les alcooliques sont friands, sont en vente libre dans les épi-bars, notamment ceux qui se trouvent à proximité des abattoirs. 
Baisse progressive
La filière bovine est laissée à l’abandon par les autorités pendant des années. Aucune politique n’a été mise en application pour la gestion à long terme du secteur. La Grande île s’est complainte de statut d’être le pays du zébu sans se soucier de la manière de préserver cette richesse. Ni chiffres ni autres informations ne sont disponibles sur l’état des lieux du cheptel à l’heure actuelle. Combien de têtes de zébu existent encore aujourd’hui Est-ce un animal en voie de disparition 
Les données existantes estiment qu’Antananarivo, à elle seule, consomme plus de 430 têtes par jour. Ce qui équivaut à un besoin de plus de 130 000 par an. Pourtant, il y a près de 78 000 naissances chaque année, ce qui fait donc un gap de plus de 40 000 têtes par an entre la naissance et la consommation, rien que pour Antananarivo. Sans parler des autres provinces, comme Toamasina, qui abrite le projet Ambatovy et qui est devenu un véritable pôle de consommation de viandes. 
Outre les impacts sur le prix, la baisse progressive de la population du cheptel bovine est constatée à vue d’œil. Depuis près de cinq ans, les grands troupeaux transportés à pied sur la RN 1 en provenance d’Ambatonapoaka sont devenus de moins en moins fréquents et semblent même avoir disparu totalement ces derniers temps. Les grands troupeaux en pâturage rencontrés fréquemment dans les principales zones d’élevage comme l’Ihorombe, Melaky ou Bongolava n’existent presque plus. Les « dahalo » ont, sans doute, contribué à décourager les éleveurs mais la technique d’élevage extensif, qui a très peu évolué depuis la nuit des temps y est sans doute pour beaucoup. 
Depuis la levée de l’embargo à l’exportation qui pesait sur la viande carnée malgache, l’année dernière, les rumeurs folles circulent sur l’existence d’une filière d’exportation illicite. Les animaux seraient embarqués en cachette sur la côte nord-ouest de l’île et transitent aux Comores avant de partir, par la suite, vers d’autres destinations. Beaucoup pensent que cette fuite serait à l’origine de l’insuffisance de l’offre sur le marché local ainsi que la recrudescence de vols de zébus. Mais les autorités sont prudentes sur le sujet et ont récemment mis en place un comité ad’hoc pour enquêter sur l’existence ou pas de cette filière, ainsi que sur les causes possibles de la flambée des prix.

Extrait l’Express de Madagascar – Mercredi 14 mars 2012

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